Le Bénin a été officiellement inscrit sur la liste des six pays africains autorisés à exporter les animaux et les produits d’origine animale au sein de l’espace communautaire européen. Une opportunité dont le gouvernement du président Patrice Talon mesure toute la portée et pour laquelle, il a pris des mesures d’accompagnement pour faciliter l’exploitation du miel béninois dans l’Union Européenne.
Quelle bonne nouvelle pour les éleveurs, les apiculteurs et les jeunes en quête d’emploi ?
C’est vraiment une très belle opportunité pour investir dans le développement des produits d’origine animale dont le miel. C’est pour explorer ce terrain que la présente communication est initiée.
L’apiculture est simplement l’élevage des abeilles par l’homme. En ce sens c’est l’ensemble des techniques permettant d’offrir un habitat ou un réceptacle
Quel regard pouvons-nous portez sur la filière apicole dans la commune de Kouandé ?
Le secteur est en souffrance malgré l’appui de plusieurs partenaires financiers et techniques : manque d’organisation et de statistiques fiables ; vols et vandalisme ; litiges divers entre acteurs, concurrence déloyale avec les producteurs du miel frelaté ; déforestation et feux de brousse, utilisation des produits phytosanitaires …et manque de financement adapté.
Sur le plan économique la demande en miel et ses produits dérivés est croissante. L’apiculture devient stratégique dans la protection de l’environnement, de la sécurité alimentaire et nutritionnelle au regard de ses multiples avantages et vertus (guérison et prévention de plusieurs maladies, pollinisation, complément alimentaire…). Mais aussi la promotion de l’emploi, surtout l’emploi vert (agroforesterie bio ou écologique).
La zone nord notamment le département de l’Atacora possède les meilleures conditions pour l’apiculture mais les obstacles tels que les feux de végétation, le pâturage, la déforestation, le vandalisme, les vols et litiges domaniaux limitent dangereusement l’éclosion de cette filière. Actuellement l’apiculture s’épanouit bien dans les régions du centre (Savalou-Bantè-Dassa- Zoumè -Savè et ses alentours).
Parlant des litiges domaniaux, certains terrains relèvent de l’Etat donc du « Domanial » et d’autres du « Foncier » propriété privée. La nouvelle loi sur le Foncier et le Domanial offre des garanties, et d’intéressantes opportunités pour développer ce secteur en toute sécurité.
Face à cette situation, SOS BIODIVERSITY par son antenne de l’Atacora préconise les solutions suivantes entre autres :
Les solutions d’ordre général ?
Tout progrès que nous réaliserons pour transformer notre modèle agricole actuel, basé sur l’utilisation intensive de produits chimiques, pour l’orienter vers un système agricole écologique sera salutaire, non seulement pour les pollinisateurs mais aussi pour d’autres composantes de l’environnement et notre sécurité alimentaire.
Dans le court à moyen terme, certains problèmes spécifiques doivent être traités en priorité pour améliorer la santé des pollinisateurs à l’échelle mondiale. Les bénéfices de ces mesures pourraient se faire sentir presque simultanément. L’élimination de l’exposition des abeilles aux pesticides pouvant nuire à leur santé constitue une étape cruciale vers la protection des abeilles sauvages et domestiques, tout comme de la valeur économique et écologique de la pollinisation naturelle.
Deux types de programmes scientifiques peuvent être menés à court et moyen terme pour inverser le processus d’effondrement des populations de pollinisateurs ; ces programmes consistent à :
- éviter de nuire aux pollinisateurs (par exemple en éliminant l’exposition aux substances potentiellement dangereuses) ;
- préserver la santé des pollinisateurs (par exemple en modifiant d’autres pratiques au sein d’écosystèmes agricoles existants).
De nombreuses pratiques visant à augmenter la diversité des plantes, à différents niveaux, peuvent améliorer les ressources florales disponibles pour les pollinisateurs, dans l’espace et dans le temps.
L’essor récent de l’agriculture biologique, ainsi que l’application croissante de techniques qui réduisent ou éliminent l’utilisation de pesticides chimiques, telle que la lutte intégrée contre les ravageurs (IPM), montrent qu’une agriculture sans pesticides est possible, économiquement rentable et sûre pour l’environnement.
L’agriculture écologique : Il a été démontré à maintes reprises que l’agriculture écologique ou biologique, respectueuse de la biodiversité et exempte de pesticides ou d’engrais chimiques, favorise l’abondance et la diversité des pollinisateurs – ce qui a une incidence favorable sur la pollinisation des cultures, et éventuellement sur les rendements. Les méthodes de production écologiques ou biologiques présentent également de nombreux autres avantages. Elles peuvent notamment contribuer à lutter contre les adventices, les maladies et les insectes ravageurs, et améliorer la résilience générale des écosystèmes.
Cependant, les projets de recherche visant à améliorer les pratiques et la gestion de ces modèles agricoles ont reçu beaucoup moins de subventions publiques que les techniques intensives en produits chimiques de l’agriculture conventionnelle. Ce manque de soutien est d’autant plus déplorable que les modèles agricoles écologiques et biologiques peuvent garantir une production alimentaire – et des bénéfices – à peu près équivalents à ceux de l’agriculture conventionnelle, tout en générant beaucoup moins d’impacts environnementaux et sociaux. Il est donc nécessaire d’investir davantage de fonds publics et privés dans la recherche et le développement des pratiques agricoles écologiques. Ces méthodes alternatives sont le meilleur moyen de tirer le plus grand parti des services écologiques et d’optimiser la production alimentaire et la protection de l’environnement, tout en contribuant à promouvoir un développement économique et social durable.
Les abeilles domestiques et les pollinisateurs sauvages jouent un rôle clé dans l’agriculture et la production alimentaire. Pourtant, notre modèle agricole actuel, basé sur une utilisation intensive de produits chimiques, met ces insectes en péril, compromettant ainsi l’approvisionnement alimentaire béninois.
Les produits chimiques contribuent considérablement à l’effondrement des colonies d’abeilles. Par conséquent, les dirigeants politiques béninois doivent :
- interdire l’utilisation des pesticides nocifs pour les abeilles, en commençant par les substances les plus dangereuses
- soutenir et promouvoir les pratiques agricoles qui favorisent les services de pollinisation au sein des systèmes agricoles, en mettant en place des programmes d’action à l’échelle nationale (par exemple : établissement de surfaces d’intérêt écologiques dans les exploitations, adoption de systèmes de rotation des cultures et de méthodes agricoles biologiques).
- améliorer la conservation des habitats naturels et semi-naturels au sein et autour des paysages agricoles, et renforcer la biodiversité sur les exploitations ;
- augmenter les crédits en faveur de la recherche, du développement et de l’application de pratiques agricoles écologiques pour que nous abandonnions les méthodes chimiques de contrôle des parasites au profit de pratiques basées sur la biodiversité, qui renforcent la santé des écosystèmes. Les responsables politiques béninois doivent veiller à ce que davantage de subventions soient accordées à la recherche sur des alternatives agricoles écologiques.
Que devons-nous faire concrètement aujourd’hui pour vraiment promouvoir l’apiculture au Bénin en général et à Kouandé en particulier ?
Pour promouvoir l’apiculture, il faut :
- Mettre à contribution la nouvelle loi sur le Foncier et le Domanial pour établir des protocoles ou contrats de sécurisation foncières et domaniales pour limiter et maîtriser les litiges divers qui constituent un véritable frein au développement de l’apiculture ;
- Réglementer l’activité et définir les normes qualités avec la participation de tous les acteurs ;
- Mettre sur pied un système de formation axé sur la professionnalisation et la recherche action. ;
- Définir des zones à hautes potentialités apicoles intégrées à la conservation de l’environnement et aux problèmes en lien avec les changements climatiques, zones reconnues et protégées par tous les citoyens ;
- créer une synergie au niveau des structures que des institutions pour bien circonscrire les problèmes liés à l’apiculture ;
- promouvoir l’apiculture d’entreprise en visant très grand à court, moyen et à long termes.
- promouvoir les jeunes dans l’apiculture puis les organiser en coopératives et autres formes ;
- enfin axer le développement du pays sur les Arrondissements afin d’ancrer et maintenir la jeunesse au cœur de la décentralisation et de l’économie locale.
L’apiculture devient un enjeu majeur au plan communal que national. Des acteurs comme nous et notre ONG deviennent désormais le cadre privilégié de mobilisation sociale, financière que stratégique pour remettre simplement l’apiculture à l’endroit. Ainsi allons-nous asseoir progressivement une base de confiance, d’efficience et d’efficacité nécessaires pour une dynamique partenariale de réussite autour de l’apiculture.
Nous sommes conscients que cette analyse n’a pas été exhaustive en ce sens que tous les aspects des menaces qui pèsent sur les abeilles n’ont pas été abordés. Cependant, l’application de nos stratégies et propositions pourra surement contribuer à nous inciter une fois de plus à réfléchir sur les enjeux et modifier nos comportements.
Nous invitons l’Afrique en général et le Bénin en particulier à tirer des leçons de la pandémie de la COVID 19 pour changer leur mode de vie et de consommation. Privilégions les énergies propres, gérons durablement nos écosystèmes, reboisons nos parcelles, protégeons les abeilles et réduisons considérablement notre empreinte écologique.
Soyons tous les gardiens des abeilles, car de la pollinisation des abeilles, nous tirons nos besoins vitaux.
Protéger les abeilles, c’est pas sorcier !
Delphin HOUNDONOUGBO Y.
Géographe, Chef Antenne Atacora/SOS Biodiversity
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